article original paru sur Weeklymail

 

 

Le sommet européen, 28ème du nom, était, une fois n'est pas coutume, crucial. Allions-nous sauver l'euro ? Si oui, comment ? Les paris étaient ouverts pour savoir quelles positions, de celle de la France ou de l'Allemagne, allaient l'emporter. Le suspens était à son comble pour ce "sommet de la dernière chance" (phrase répétée à l'envie par l'ensemble des médias) qui allait soit précipiter l'Europe ou la sauver (vous avez sûrement remarquer à quel point les sommets européens ressemblent à une tragédie grecque...oups ! Milles excuses, le jeu de mot n'était pas voulu...)

Dans un article datant du 28/06, l'Expansion nous donne Dix mots pour comprendre le sommet européen . Le journaliste Louis Amar, liste donc les points d'oppositions et d'unions des différents protagonistes pour ce sommet.

Nous apprenons qu'une des principales discordances se fait sur les notions d'intégration et de solidarité. L'intégration, préconisé par l'Allemagne via Mme Merkel, consiste à une union budgétaire où les budgets nationaux seraient validés par Bruxelles, impliquant, de fait une perte de souveraineté nationale, tandis que la solidarité, souhaité par M. Hollande, souhaite mettre en place "des mécanisme d'aide, qui permettraient aux pays les plus en difficultés (Grèce, Portugal, Espagne, Italie) de s'appuyer sur leurs voisins plus solides. La clé de voûte de ce système serait la mutualisation des dettes européennes, les eurobonds."

Par contre, les 27 semblaient d'accord sur un point : l'Union bancaire comprenant une instance supranationale de supervision et "un fonds de garantie des dépôts, alimenté par le privé".

Une infographie publiée sur le nouvelobs permet de voir en un coup d’œil qui pense quoi avant le sommet européen.

Vous êtes déjà au courant que l'Espagne et l'Italie sont sortis 'vainqueurs' de ce sommet (je ne parle pas de l'euro 2012 où l'Italie a sorti l'Allemagne de la compétition). En refusant de signer l'accord sur le plan de relance de 120 milliards d'euros si aucunes solutions rapides, et à court terme, n'étaient proposées pour faire baisser la pression des marchés sur leurs deux pays. Ce coup de force, payant, a été relaté dans cet article afp repris par rtbf, qui prend un malin plaisir à mêler le match, opposant les footballeurs transalpins et ceux de l'outre-Rhin, à celui ayant lieu à Bruxelles.

M.Monti et M.Rajoy, soutenus par M. Hollande, souhaitaient un Bouclier anti-spread, pour enrayer la flambée des taux sur le marché obligataire. Ils ont réussi à obtenir un accord de principe qui sera discuté le 9 juillet lors de la prochaine réunion de l'eurogroupe.

Qu'est ce qui a été décidé lors de ce sommet ? Le nouvelobs.com nous en fait un résumé :

" Ce qui a été décidé

• La signature d'un pacte de croissance pour 120 milliards d'euros d'investissements (60 via la Banques européenne d'investissement, le reste via le déblocage de fonds structurels). • La possible recapitalisation des banques directement via les fonds de secours européens : le Mécanisme européen de stabilité (MES) et le Fonds européen de stabilité financière (FESF).

• La Banque centrale européenne (BCE) "jouera pleinement son rôle" dans la supervision financière.

• Accord de principe sur le pacte de stabilité budgétaire

• Les fonds de secours pourront venir en aide de manière plus flexible aux pays qui font leurs devoirs mais ne sont pas récompensés sur les marchés, par exemple en achetant de la dette.

Création d'un brevet unique européen qui devrait permettre de réduire fortement le coût des inventions. La gestion administrative du futur organisme sera répartie entre Londres, Paris et Munich. • Ouverture de négociations d'adhésion avec le Monténégro. Le pays va devoir garantir l'indépendance de la justice et s'atteler à la lutte contre le crime organisé et la corruption.

• Deux nominations : Klaus Regling, président du FESF, prendra également la présidence du MES. Yves Mersch, président de la banque centrale du Luxembourg, rejoint le directoire de la BCE à la place de l'Espagnol José Manuel Gonzales-Paramo."

Donc, tout le monde est content. Les dirigeant européens sont tellement contents qu'ils se congratulent ("Ah bravo François (Hollande) !" "Non non bravo à toi "super" Mario (Monti)" ! "Hin Hin t'es con François ! Tiens voilà "Luis" Mariano (Rajoy) ! Bravo à toi mec ! "Sérieux vous êtes cons les gars, arrêtez avec les surnoms de merde..."). Les marchés sont tellement contents que les bourses sont reparties à la hausse dès le lendemain. Même Standard&Poor's semble enthousiaste.

Tout le monde ? Non, tout le monde n'est pas content.

- Tout d'abord, Trois pays européens critiquent les résultats du dernier sommet de l'UE: la Finlande, les Pays-Bas et la Slovaquie remettent en cause les résultats du sommet européen et s'opposent à la recapitalisation directe des banques par le Mécanisme européen de stabilisation (MES) et " le rachat par ce même fonds de sauvetage d’obligations d’Etat en difficulté sur le marché secondaire"

- Le Yéti de Rue 89 est ulcéré : " Leur grande trouvaille, c’est qu’ils vont (peut-être) confier le sauvetage des banques directement au FESF (Fonds européen de stabilité financière) et à son successeur désigné, le MES (Mécanisme européen de stabilité). Epargnant ainsi aux Etats membres le tracas d’être livrés aux tracasseries des vils spéculateurs. Problème : qui alimentent les caisses de ces deux respectables organismes, le FESF et le MES ? Des emprunts garantis par les Etats membres ! Donc les Etats eux-mêmes déjà surendettés à mort. Comme la France lors de ce premier trimestre pré-Hollande. Faut-il vous faire un dessin ? Ou préférez-vous continuer à saliver sur leur pochette à la con ?" Je crois que c'est assez clair.

- Dans sa tribune L'économie réelle encore oubliée publiée sur Marianne.fr, Philippe Murer enfonce le clou : " François Hollande demande aux Français d’économiser milliard après milliard et de saborder ainsi l’économie française puisque :

- L’investissement des entreprises est en baisse

- La consommation est au point mort avec un pouvoir d’achat en baisse et des licenciements

- Les dépenses de l’Etat seront réduites après inflation de 2% par an

- Une demande extérieure en baisse avec nos principaux partenaires européens qui ont la même politique de Gribouille

Ce qui implique automatiquement une récession avec toutes les composantes de la croissance négatives. Si jamais cette politique aboutit comme il se doit à une dépression généralisée en Europe à partir de septembre, et que les marchés continuent en réponse à faire monter les taux espagnols et italiens, l’Europe jettera ces milliards patiemment économisés dans les marchés financiers ou se traitent 2.800 milliards de dette italienne et de dette espagnole ! C’est le projet. On ne prêtera même pas à l’Italie et à l’Espagne cet argent, on rachètera de la dette sur les marchés financiers à des assureurs ou banquiers en difficulté."En guise de conclusion, M.Murer, fustige cette "politique économique [...] immorale" qui entraîne le peuple dans la spirale de la récession pour satisfaire Les Marchés.

- Même son de cloche chez Jacques Sapir, qui après avoir dénoncé des accords pas si formidables que ça dans une tribune intitulée Un sommet en trompe l’œil, prédit : "L’accord de Bruxelles de la nuit du 28 au 29 juin permettra de tenir jusqu’à la fin octobre, voire au début du mois de novembre, mais pas au-delà, et ceci à supposer que nul autre pays de la zone Euro ne demande brutalement de l’aide entre temps. Nous arrivons ici à l’extrême fin des moyens disponibles [...] La spéculation sur les taux d’intérêt reprendra dès cet été et nous serons à nouveau confrontés à une nouvelle crise à l’automne 2012."

De quoi profiter de l'été donc...

Marine Bequet